Par Imen Zine
En s’appuyant sur une série d’études institutionnelles, d’éléments de preuve empiriques et des conclusions des enquêtes parlementaires réalisées au Royaume-Uni, pays qui a opté pour le Partenariat Public-Privé (PPP) depuis 1992, l’Observatoire tunisien de l’Economie (OTE) a recommandé, dans sa note de synthèse, d’intégrer dans la loi sur le PPP plusieurs dispositions visant à limiter les risques et les dépassements dans ce projet.
Il s’agit de soumettre le PPP aux mêmes principes figurant dans le code des marchés publics, à savoir la transparence, la concurrence réelle et l’égalité de traitement. S’il y a un soumissionnaire unique la procédure doit être arrêtée, selon l’observatoire.
Il a été recommandé de supprimer les collectivités locales en tant que personne publique apte à signer le PPP. En effet, il est prématuré de permettre cela étant donné que ces dernières n’ont pas encore à l’heure actuelle les compétences requises pour mener à bien un appel d’offres classique.
D’autre part, la durée du contrat PPP ne devrait pas excéder vingt ans, et ce, afin de stimuler la concurrence, faire participer les PME tunisiennes à capital tunisien majoritaire: il est, de ce fait, impératif de réduire les durées des contrats et de fractionner les lots qui font l’objet d’appel d’offres pour rendre ces marchés accessibles aux petits entrepreneurs.
Le PPP devrait, également, répondre uniquement aux besoins de la personne publique dans le cadre de la stratégie nationale de développement et ne devraient pas être soumis à l’initiative privée. Il importe d’exclure formellement du PPP certains secteurs, tels que la défense nationale, la sécurité, l’énergie, les télécommunications, la distribution de l’eau et de l’électricité, la santé et l’éducation.
L’Observatoire tunisien de l’Economie a, de même, estimé que le partenaire public doit mener au moins deux évaluations pour tous les projets du PPP, soit une évaluation à l’achèvement de l’investissement initial une fois le service en fonctionnement et une autre évaluation après cinq ans, afin de s’assurer que tous les risques peuvent être minimisés.
Il est, par ailleurs, nécessaire d’ajouter dans la loi sur le PPP, les modalités, la méthodologie et les critères d’évaluation comparée des coût/bénéfices permettant de déterminer, s’il est plus avantageux économiquement et socialement, de recourir à un PPP plutôt qu’à un marché public.
Dans le même sillage, il a été constaté que le montage juridique du PPP ne doit pas contenir de structure juridique domiciliée dans un paradis fiscal. La structure juridique principale, le Trust, doit être domicilié en Tunisie.
Toutefois, la part du remboursement du capital et des intérêts de l’emprunt réalisé par le privé et compris dans le loyer versé annuellement à la personne privée doit être enregistrée dans l’encours de la dette publique et non pas dans les dépenses d’investissement, conformément à l’article 15 de la Constitution sur les principes de transparence et d’intégrité dans la gestion des affaires publiques.
Parmi les dispositions visant à limiter les risques et les dépassements dans la loi sur le PPP, s’affichent aussi le rapport d’évaluation et la méthodologie d’évaluation qui doivent être, selon l’observatoire, rendus publics conformément aux articles 15 et 10 de la Constitution sur la transparence et la bonne gestion des deniers publics
Tout de même, les documents d’appel d’offres, les appels d’offres et les contrats du PPP, y compris les détails financiers, doivent être publiés pour limiter les risques de corruption conformément à l’article 10 de la Constitution sur la bonne gestion des deniers publics.
Il est prématuré de recourir à l’arbitrage international dans les clauses des contrats du PPP et ce recours doit être interdit. Et en cas de litige entre le partenaire privé et public, les parties pourront saisir les tribunaux nationaux.
Il a été, également, recommandé que la personne publique puisse pouvoir résilier le contrat PPP dans l’intérêt général en cas de circonstances imprévues, et qu’une phase de projet pilote doit être mise en place et suivie d’une évaluation des impacts socioéconomiques du projet. Cette évaluation sera présentée à l’ARP pour la généralisation du PPP selon les résultats.
En conclusion, l’Observatoire tunisien de l’Economie a dévoilé que «le projet de loi sur le PPP est un projet prématuré et ne représente pas une alternative au manque d’infrastructures et services publics pour les pays en développement».
A l’étude de ce contrat et au vu des expériences comparatives dans les pays européens, il est démontré que «le PPP est un échec. Il comporte plus de risques et d’inconvénients que d’avantages. De plus, nos administrations et collectivités locales ne sont pas formées pour négocier ce type de contrat et pour suivre/contrôler ce type de projet, que ce soit en termes d’expérience qu’en termes de formation», a affirmé l’observatoire ajoutant que dans le cas où ce projet de loi serait adopté, il est nécessaire qu’il intègre des garde-fous, afin d’éviter au maximum les risques.